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n’ont jamais passé à la postérité. Aussi voyons-nous que les ouvrages qui nous restent aujourd’hui, sont les mêmes qu’on estimoit au-dessus de tous les autres dans Athènes & dans l’ancienne Rome.

La raison de la conservation d’un bon livre, préférablement à un médiocre ou à un mauvais, est si sensible, qu’elle n’a pas besoin d’être prouvée par de grands argumens. On conserve ce qui est précieux avec autant de précaution qu’on en prend peu à garder ce qu’on mésestime. Les historiens Grecs & Romains qui nous restent aujourd’hui, sont de précieux dépôts que vingt siécles nous ont transmis pour les remettre avec autant de soin à notre plus reculée postérité.

Dans mille ans d’ici, nos neveux n’auront que les meilleurs de nos historiens. Ils seront délivrés de tous les mauvais, dont les vers, la poussière & les beurrières auront vengé l’univers. L’illustre de Thou parviendra jusqu’aux tems les plus éloignés. Mezerai & quelques autres historiens, quoique moins parfaits que ce premier, seront aussi estimés par la postérité. Mais combien d’écrivains périront successivement les uns après les autres ? Combien en est-il déja, qui, tristes avortons, sont morts dès leur naissance ?