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Socrate, Platon, Epicure, ont été, selon moi, les philosophes les plus sensés de l’antiquité. Je laisse à part la vérité de leurs opinions ; mais il regne dans leurs écrits une sagesse, une retenue & une candeur qui furent accompagnées d’une grande régularité de mœurs. [1]

La raison fut la règle de ces grands hommes. En quittant le monde, ils en éviterent les embarras sans haïr les humains. Ils conserverent dans la solitude, où ils se retirerent souvent pour méditer plus à leur aise, les plaisirs que les honnêtes gens goûtent dans le monde, & ne firent que leur ôter le moyen de nuire en devenant trop violens. Je serois tenté de mettre Epictète auprès de ces grands hommes ; mais sa sévérité outrée me paroît mal placée : je la trouve une suite de sa vanité. J’entrevois sans cesse dans ses préceptes moraux un chagrin qui régne ; & le philosophe chez lui se ressent toujours de la mauvaise humeur de l’esclave d’Epaphrodite.

  1. Par les écrits de Socrate, il faut entendre les choses mémorables de Socrate : ouvrage dont Xénophon est l’auteur, ou plutôt le copiste, puisqu’il ne contient que les principaux discours que Socrate avoit faits pendant sa vie. Il ne nous reste plus d’Epicure que quelques morceaux détachés, qui se sont conservés dans les écrits de plusieurs auteurs : & de tant de livres que ce philosophe avoit composés, aucun n’est parvenu jusqu’à nous.