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Que penses-tu, mon cher Isaac, d’une religion sujette au changement ? La stabilité & l’immutabilité sont les marques de la vérité. Cette fille du ciel n’est point vacillante : elle ne court pas après la nouveauté, & ne se prête pas aux idées chimériques des hommes. As-tu jamais vû dans le paganisme, je ne dis pas dans le paganisme éclairé, mais dans l’idolâtrie la plus crasse, rien d’aussi monstrueux que d’agiter si la créature doit aimer son créateur ? Dès le moment que Dieu donna la loi à son peuple, ce fut-là son premier commandement. Les nazaréens croient, enseignent, conservent les mêmes commandemens qui furent écrits sur la montagne de Sinaï. Comment ne leur servent-ils pas de soutien contre de semblables égaremens ? Je crois que le dieu d’Abraham, a répandu sur eux cet esprit de perversion, qui les empêche de se servir des notions les plus claires. Ils nous reprochent tous les jours notre entêtement, notre indocilité.

Veulent-ils que nous embrassions une loi, qui dispense d’aimer Dieu, & qui, à la faveur des deux syllogismes & d’un enthymême, répand une obscurité sur le précepte le plus clair & le plus nécessaire ? Laissons-les, mon cher Isaac, dans leur aveuglement ; & ne faisons attention