Page:BoyerDAgen - Les Amities litteraires de Debordes-Valmore.djvu/23

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 19 —

au jeune lauréat de Toulouse d’aller offrir, à Albi, ses services d’avocat ou de secrétaire à la tout à coup célèbre M"^^ E. Manson qui répondit, de la prison, à ce blanc-bec : (( Vous pourriez, un jour, vous faire une célébrité moins étendue, sans doute, mais plus souhaitable que la mienne,

— et vous pouvez m’en croire, car je dis la vérité à Albi. » Cette lettre, datée du 8 mai, fit tomber une première illusion de l’avocat sans cause qui, remontant au pays natal, entreprit à Luxeuil deux affaires à la fois, une papeterie dont il fut le régisseur et un mariage par lequel il devint l’heureux époux de Clarisse Duchelard, nièce de Michaud qui devait employer tant de papier à sa Biographie universelle en 52 volumes où le neveu prodigue figurera à son heure, pour l’article de vengeresses représailles que les mauvaises affaires de ce mauvais mari lui auront bien méritées.

Il ne fallut pas plus de deux ans à ce poète papetier pour ruiner l’entreprise. Laissant sa femme avec leurs deux premiers enfants, Aimé de Loy partit pour l’Amérique du Sud où ce conquistador de race n’eut qu’à se rappeler l’ancêtre Pizarre et ses prouesses de fortune, pour ne pas désespérer de la sienne. Mais ce fut, cette fois, la poésie qui sauva son homme. C’était l’heure où le Brésil cherchait un souverain, et le souverain un secrétaire de ses Etats ou de ses Commandements, Don Pedro fut cet empereur fortuné, et Aimé de Loy son premier ministre qui avait révélé tout à coup sa valeur par l’envoi de son ode la Liberté à Dom Pedro :

Voyez cette belle étrangère

Qui veille en souriant sur Fempire au berceau. Cette fille du ciel allait quitter la terre Quand un dieu Taccueillit dans ce monde nouveau. « Poète, connais-tu le nom de l’immortelle ?

— Oui, c’est la Liberté ! — Son pays ? — L’Eurotas ! Paul-Émile a vaincu pour elle,

Pour elle est mort Léonidas. »

Quels trésors d’archives nationales le Brésil n’allait-il pas trouver dans le cerveau d’or de ce passant si merveilleusement instruit, qui faisait remonter ces marchands de café à