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son de campagne qu’habita lord Byron et les toits du château de Mme de Staël. (Pensez donc qu’il n’avait, lui, qu’un grenier à Genève !) Où est le barde de Childe-Harold ? Où est l’auteur de Corinne ? Une trop longue vie ressemble à ces voies romaines, bordées de monuments funèbres. » Ce fut après la lecture de cet hommage démesuré du Légitimiste endurci au Nationaliste réfractaire qu’un vieux hibou de tour féodale, « un vieux chevalier de Saint-Louis », inconnu de Chateaubriand, lui écrivit cette protestation que l’orgueilleux impénitent s’est plu à consigner dans ses Mémoires d’Outre-Tombe : « Réjouissez-vous, Monsieur, d’être loué par celui qui a souffleté votre roi et votre Dieu ! »

La foudre, comme les aigles, aime les sommets des montagnes. En publiant cette lettre pour le moins inattendue du solitaire de Genève, la gazette du libéral Armand Carrel suivait, à quelques semaines près, l’exemple de celle du Journal des Débats où le 10 octobre précédent, le paradoxal M. Bertin, pressentant un imbroglio de signatures qui amuserait ses lecteurs, avait fait matière à feuilleton d’un autre poème adressé à Chateaubriand par un autre poète signant cette œuvre de ses initiales discrètes. Quel indiscret journal résisterait, le lendemain, à rétablir la signature entière et à attribuer ces vers à Alphonse de Lamartine lui-même ? « Encore des vers, de bien beaux vers à M. de Chateaubriand, du plus grand au plus noble écrivain de nos jours… » Et le Journal des Débats, après s’être couvert du chapeau dithyrambique qu’il empruntait au Mercure Ségusien, dirigé à Saint-Étienne par le poète Aimé de Loy, publiait in extenso, jusqu’à sa signature finale et troublante A. de L., ce poème à M. de Chateaubriand dont les deux premières et les deux dernières de ces longues et fort ingénieuses strophes disaient :

Quand le grand écrivain que notre siècle adore Expiait par ses pleurs le chef-d’œuvre d’Endore, Proclamant dans ses vers Tarrêt du temps vainqueur, Fontanes consolait son illustre disgrâce : Il couvrait des lauriers de Virgile et du Tasse Les blessures d’un noble cœur.