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LE SECOND VIEUX.

Oui, c’est beau.

LE PREMIER VIEUX.

J’ai beaucoup voyagé, couru le monde, admiré des merveilles, de hautes montagnes couvertes de neiges éternelles.

LE SECOND VIEUX.

Les Alpes ?

LE PREMIER VIEUX.

Les Alpes et les Pyrénées. J’ai vu le Jura avec ses verts prés, le Rhin et le Rhône majestueux, l’heureuse Dordogne, la Loire et ses châteaux, et je suis revenu vers la Meuse comme vers une vieille maîtresse.

LE SECOND VIEUX.

Moi, je demeurai près d’elle toute ma vie et je ne me suis jamais lassé de la regarder et je l’aime, vieillard, comme l’on aime l’enfant de son enfant.

LE PREMIER VIEUX.

Tu n’as jamais songé à t’en aller.

LE SECOND VIEUX.

Que si ! Parfois, en voyant passer les bateaux aux noms évocateurs… Europe, Asie, La Saône, Paris, en lisant, sur leur flanc, l’inscription indiquant leur port d’attache : Rotterdam, Dusseldorf, Rouen, tant de noms de villes et de pays, il m’est advenu de les suivre, en rêvant, au fil du fleuve.

LE PREMIER VIEUX.

Et ?

LE SECOND VIEUX.

Et quand mon regard atteignait l’horizon, quand au sortir de la courbe, derrière le rocher, je voyais s’élever la fumée du