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Le pauvre homme allait certainement mourir.

Je lorgnai mon voisin. Il frisait sa moustache. Un bouton doré fermait le col de sa chemise. Maigre, nerveux, petit, il m’était sympathique à moi, grand, sentimental et indolent.

La nuit tombait. Les becs de gaz, déjà allumés, n’éclairaient pas encore. Le ciel était d’un bleu froid. Il y avait des dessins géographiques sur la lune.

Mon voisin s’éloigna sans me saluer. Je crus deviner à son attitude indécise qu’il espérait que je le rejoindrais.

J’hésitai une seconde, comme tout homme l’aurait fait à ma place, car, en somme, je ne le connaissais pas ; la police pouvait très bien le rechercher.

Puis, sans réfléchir, je le rattrapai.

La distance avait été si courte que je n’eus pas le temps de préparer ce que j’allais dire. Aucun mot ne sortit de ma bouche. Quant à l’inconnu, il ne se souciait pas de moi.

Il marchait drôlement en posant le talon avant la semelle, comme un nègre. Une cigarette tenait à son oreille.