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çus plus que mes pieds étaient mouillés, au bord de la semelle.

Je venais d’avoir eu l’idée d’attendre la fille de M. Lacaze à la sortie du Conservatoire.

Je luttai mollement, pendant quelques minutes, contre cette lubie. Ce fut inutile. La perspective de parler à une jeune fille riche avait trop d’attrait. C’était, dans l’après-midi pluvieuse, comme un rendez-vous attendu depuis plusieurs jours. C’était l’inconnu, l’amour peut-être. Aucun désir physique ne me poussait vers cette jeune fille. D’ailleurs, quand j’aime quelqu’un, je ne songe jamais à la possession. Je trouve que plus elle tarde, plus elle est agréable.

J’errais dans les rues, l’âme joyeuse et vivant seule, sans les yeux. Les parapluies fermés des passants étaient encore luisants. Les trottoirs blanchissaient, le long des murs.

Au-dessus de la porte du Conservatoire, il y a un drapeau.

Il n’était que quatre heures moins le quart.

Pour patienter, je fis les cent pas en pensant à tout ce qui se passerait d’heureux si Mlle Lacaze m’aimait. Il ne faut pas croire que je songeais à sa richesse. Si elle m’offrait de l’ar-