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sans bouger la tête, la tour de la gare de Lyon, avec ses horloges déjà éclairées. Quand le vent cessait, l’air sentait le ruisseau à sec.

Je m’arrêtai, et, m’accoudant sur le parapet, je regardai tristement devant moi.

La cheminée des remorqueurs tombait en arrière, avant les ponts. Des câbles tendus reliaient des péniches habitées au milieu. Une longue planche joignait un chaland au sol. L’ouvrier, qui s’aventurait dessus, rebondissait à chaque pas, comme sur un sommier.

Je n’avais pas l’intention de mourir, mais inspirer de la pitié m’a souvent plu. Dès qu’un passant s’approchait, je me cachais la figure dans les mains et reniflais comme quelqu’un qui a pleuré. Les gens, en s’éloignant, se retournaient.

La semaine dernière, il s’en était fallu de peu que je ne me fusse jeté à l’eau, pour paraître sincère.

Je contemplai le fleuve, en songeant à la monnaie gauloise qui devait se trouver au fond, lorsqu’une tape sur l’épaule me fit lever le coude, instinctivement.

Je me retournai, gêné d’avoir eu peur.