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dans le confesseur, affirment que les Conciles et le Vatican ont édicté les peines les plus sévères contre les prêtres qui briseraient le sceau de la confession. La tactique de ces docteurs s’explique naturellement ; il s’agit pour eux de maintenir cette institution, source de leurs richesses, de conserver cet instrument formidable de domination.

Au secret pénitentiel est attaché l’honneur des femmes, des filles, le repos des familles, la paix de la société et des États. Si les confessions peuvent être révélées, que de scandales, que de troubles, que de malheurs publics et privés !

Il y a peu de femmes, parmi celles qui affichent le plus de dévotion, parmi celles que le monde cite comme de hautes vertus, qui n’aient eu leurs jours de faiblesse, et qui n’aient à confesser leurs chutes. Il est essentiel de rassurer ces belles pénitentes, reines ou bourgeoises, impératrices, grandes dames ou grisettes ; c’est pour calmer leurs craintes que l’Église proclame solennellement le sceau de la confession, — obligatoire, inviolable, sacré. — Le moindre doute sur ce sujet délicat suffirait pour éloigner toutes les colombes du sacrement de la pénitence.

Les saints canons renferment donc des prescriptions spéciales contre les prêtres qui se rendraient coupables d’abus de confiance ; ils prononcent l’interdit, la révocation et la peine des galères perpétuelles. Mais ces menaces suspendues sur la tête des délinquants sont plus fictives que réelles, aucun code pénal n’édicte les galères perpétuelles pour des indiscrétions, et aucun gouvernement, même dans les pays catholiques, ne ratifierait les jugements prononcés par l’autorité diocésaine.

Les curés ne s’inquiètent nullement des saints canons pour le règlement de leur conduite en matière de confession ; les menaces inscrites dans les décrétales sont donc sans efficacité pour retenir les intempérances de leur langue, s’ils sont bavards et indiscrets.

Notre grand écrivain J. Michelet exprime une opinion tout à fait défavorable au clergé régulier et séculier sur la question du secret des confessions, notamment en ce qui concerne le Jésuite confesseur. « Le Jésuite n’est pas seulement confesseur, il est directeur et, comme tel, consulté sur tout : mais, comme tel il ne se croit nullement engagé au secret ; en sorte que vingt confesseurs, qui vivent ensemble, peuvent mettre en commun, examiner et combiner les milliers d’âmes qui leur sont ouvertes et qu’ils voient de part en part. Mariages, testaments, tous les actes de leurs pénitents et pénitentes peuvent être discutés, préparés dans ces conciliabules. »

Autre témoignage à produire, d’autant plus concluant qu’il émane d’un prêtre investi d’une dignité ecclésiastique, le chanoine Mouls, qui s’est trouvé en rapports, pendant vingt années ou plus d’exercice du sacerdoce, avec un grand nombre de prêtres, de moines, de chefs d’ordres et des plus hauts dignitaires de l’Église, vivant dans l’intimité des évêques, archevêques et cardinaux.

« Nous prêtres, nous savons de science certaine que souvent les membres du clergé, dans les réunions intimes, après les délices d’un festin, quand le nectar des Dieux a exalté les têtes et délié la langue, ne se font pas faute de porter atteinte indirectement et même directement et de toutes manières au secret du confessionnal.

« Les profanes sont écartés ; les convives peuvent parler en toute liberté. De grands éclats de rire accueillent les révélations que fait un des curés sur les confidences qu’il a reçues en confession de quelque dame connue de l’assistance. On glose et l’on commente les péchés mignons de la belle pénitente ; elle est bafouée et tournée en ridicule. La moquerie s’ajoute à l’indiscrétion. »

Lois de l’Église sur le sceau de la confession, pourriez-vous être respectées par des prêtres en goguette, lorsque des pontifes en font eux-mêmes mépris et commandent aux confesseurs de révéler les secrets du tribunal de la pénitence ?

Pie VII, Léon XII, Grégoire XVI, Pie IX, ont lancé des bulles enjoignant aux confesseurs l’ordre de révéler tout ce qu’ils apprendraient au confessionnal sur la Franc-maçonnerie et sur ses adeptes, sur les sociétés politiques et sur leurs membres, même sur les personnes qui seraient soupçonnées d’en faire partie.

De ces divers témoignages, de ces preuves authentiques, ne doit-on pas conclure que le sceau de la confession est un de ces mensonges sacrés destinés à tromper la foule crédule ?

Époux imprudents, femmes légères, inconsidérées, sachez bien qu’en continuant à fréquenter le tribunal de la pénitence, en envoyant vos enfants à confesse, vous mettez votre honneur, votre repos, celui de vos familles, à la merci d’un homme qui peut abuser et qui, probablement, abusera de la connaissance de vos secrets, ou qui, tout au moins, les fera servir aux amusements d’une société de curés ivres ou qui les livrera aux quolibets des courtisanes de l’Église à ses heures de débauche.

Si nos déclarations et nos affirmations ne suffisent pas pour convaincre les ferventes catholiques sur la divulgation certaine, permanente, par la plupart des confesseurs, des secrets qui leur sont confiés au tribunal de la pénitence, nous les engageons à soumettre leurs doutes au criterium du bon sens, de la logique.

Est-il vrai que les tribunaux français et étrangers enregistrent fréquemment des condamnations contre des curés convaincus d’outrages aux mœurs, de profanations, de sacrilége, d’adultères, de viols, pour attentats odieux commis sur de jeunes enfants, filles ou garçons, au confessionnal, dans l’église, dans les sacristies ou ailleurs ?

Est-il vrai que les tribunaux français et étrangers aient condamné à mort ou aux travaux forcés à perpétuité des curés pour avoir tué, étranglé ou coupé en morceaux des filles et des femmes, leurs pénitentes, dont ils avaient fait leurs maîtresses ; le curé Maingrat, le curé Contrafatto, l’abbé Delacolonge et tant d’autres ?

Est-il vrai que les évêques et les conseils diocésains interdisent presque journellement des curés convaincus d’entretenir des relations intimes avec