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der comme probable que c’est dès l’instant de la conception, ou au moins dès que le fœtus prend la forme d’un corps humain. Comme on doit toujours prendre le parti le plus sûr, lorsqu’il s’agit d’un moyen nécessaire au salut, le doute suffit pour qu’on doive administrer le baptême sous condition. Il s’ensuit : 1o qu’on doit baptiser tout fœtus provenant de la femme, si on n’y découvre pas des marques certaines de mort (d’après Cangiamila, on en a vu qui n’étaient que de la grosseur d’une abeille et qui vivaient) ; 2o qu’une femme qui fait une fausse couche, ou chez laquelle se produit un accident qu’elle a lieu de regarder comme une fausse couche, doit veiller à ce qu’on ne jette pas inconsidérément ce qu’elle a rendu : il faut s’assurer s’il y a un ou plusieurs fœtus, et s’ils sont dans le cas d’être baptisés ; 3o qu’il est utile d’avertir une femme nouvellement mariée de prendre, en cas d’une fausse couche, les précautions dont nous venons de parler. Cet avertissement ne peut guère se donner qu’au confessionnal ; encore faut-il y mettre beaucoup de discrétion, pour ne pas choquer ni scandaliser.


IIe QUESTION

COMMENT DOIT-ON BAPTISER LES AVORTONS ?


1o Ou l’avorton est manifestement vivant, et dans ce cas on le baptise sans condition ; ou sa vie est douteuse, quoiqu’il ait bien clairement la forme humaine, et on se sert de la forme conditionnelle : Si tu vivis, ego te baptizo, etc., ou si l’on doute de sa forme et de sa vie, alors on dit : Si tu es homo et vivis, etc.

2o Si le fœtus est enveloppé dans sa membrane, comme il paraît que cela arrive souvent, on doit le baptiser sur la membrane, en disant : Si tu es capax ou si tu es homo et capax, etc., de peur que le contact de l’air ne le tue. On ouvre ensuite la membrane et on le baptise de nouveau sous la condition : Si tu ’'non es baptizatus, etc., parce qu’il est douteux que le baptême donné sur l’enveloppe soit valide, puisque l’eau n’a pas touché immédiatement le corps de l’enfant il n’est pas non plus certain qu’il soit nul, parce qu’on peut regarder cette enveloppe, à laquelle l’enfant tient, comme faisant un tout avec lui.

3o Il serait possible que l’avorton fût assez faible pour que l’eau froide le tuât en le touchant, avant même que le baptême fût accompli : pour éviter cet inconvénient, il faut se servir d’eau tiède, si on en a, ou si on peut en avoir promptement ; car s’il fallait attendre pendant un temps notable, il vaudrait mieux se servir d’eau froide : de deux inconvénients inévitables à la fois, on doit choisir le moindre.

4o Lorsque l’enfant est si petit qu’on ne peut le baptiser à la manière accoutumée, on met l’eau dans un plat et on le baptise par immersion, ayant soin de le retirer promptement, pour ne pas le noyer. Car quoiqu’on ait la certitude qu’il ne peut vivre longtemps, il n’est pas permis de le tuer, et celui qui le ferait volontairement serait homicide et irrégulier ; mais, s’il cause sa mort en le baptisant avec les précautions que nous recommandons, il n’est ni irrégulier, ni coupable d’aucun péché.


IIIe QUESTION

QUELLES SONT LES CAUSES DES AVORTEMENTS ?


1o Nous ne devons point parler ici des moyens criminels dont se servent trop souvent des filles qui, ayant prévariqué, craignent de perdre leur honneur, et des femmes mariées qui ne voudraient point avoir d’enfants elles ne nous demandent point conseil sur l’exécution de leurs affreux desseins, et si elles nous interrogeaient, nous ne serions point embarrassés pour leur répondre.

2o Il est certain qu’une femme enceinte ne peut, sans se rendre très-coupable, s’exposer témérairement au danger d’avoir une fausse couche ou de faire périr son fruit dans son sein : ce danger se trouve, d’après l’expérience, dans des courses ou des marches forcées, dans des voyages sur des voitures non suspendues, dans des travaux pénibles, dans des efforts pour soulever ou porter des fardeaux, dans l’intempérance et dans un jeûne excessif, dans des danses et autres mouvements violents du corps, dans l’abus du café, du vin et de toutes liqueurs fortes, dans les actes de toute passion immodérée, comme la colère, la tristesse, la joie ; dans des cris violents, quelquefois dans des éclats de rire. Quoique l’avortement puisse avoir lieu dans tout le cours de la grossesse, il arrive néanmoins plus souvent, au rapport des médecins, dans le second et le troisième mois. Il est bon que les curés et les confesseurs connaissent ces sortes de dangers, afin de donner les avis nécessaires aux femmes et filles enceintes, quand la prudence le leur permet.

3o Ceux qui, en maltraitant injustement une femme enceinte, en l’outrageant ou en l’effrayant, sont cause qu’elle accouche avant le terme, sont coupables d’un homicide indirect, et ils ne pourraient être excusés de péché mortel et d’irrégularité, supposé que l’enfant eût l’âge requis, que par l’ignorance ou par l’inadvertance.

4o Mais rien au monde ne peut excuser ni aux yeux de la religion, ni aux yeux de la raison, ceux qui donnent ou indiquent sciemment des remèdes pour procurer l’avortement. Leur péché, aussi bien que celui des femmes qui ont recours à ces moyens ou à tout autre dans le dessein de se faire avorter, est au nombre des cas réservés dans ce diocèse. Un médecin anglais, Buchan, ne craint pas de dire, t. 4, page 167, que ces femmes commettent le crime le plus atroce qui puisse être commis contre la nature : on ne peut l’envisager, dit-il, sans horreur, même de la part de la femme la plus abandonnée ; à plus forte raison, n’est-il jamais excusable chez celle qui veut passer pour honnête. Les infâmes qui prêtent leurs secours à de telles femmes, méritent les châtiments les plus sévères.


IVe QUESTION

QUAND L’ACCOUCHEMENT EST LABORIEUX OU PARAÎT IMPOSSIBLE, FAUT-IL BAPTISER L’ENFANT DANS LE SEIN DE SA MÈRE ?


1o Il est certain que dans ces cas difficiles, la vie de l’enfant est manifestement en danger. S’il pré-