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IV. On n’est pas tenu de rendre le devoir à celui qui le demande trop fréquemment, plusieurs fois dans la même nuit, par exemple, car c’est contraire à la raison et cela pourrait devenir très dangereux. La femme doit cependant, autant que la chose est en son pouvoir, dit Sanchez, l. 9, disp. 2, no  12, se prêter aux besoins libidineux de son mari lorsqu’il éprouve de violents aiguillons de la chair : la charité l’oblige en effet à éloigner de lui, autant que possible, le danger d’incontinence.

V. La femme n’est pas tenue de rendre le devoir pendant le flux de ses menstrues ou celui qui accompagne ses couches, à moins qu’elle n’ait quelque motif de craindre que son mari tombe dans l’incontinence ; si cependant elle ne peut, par ses prières, le détourner de l’acte conjugal, elle doit rendre le devoir ; car il y a toujours à craindre le danger d’incontinence, les disputes ou autres désagréments. C’est l’opinion de St Bonaventure et de beaucoup d’autres que cite Sanchez, l. 9, disp. 21, no  16.

Les théologiens enseignent généralement qu’il est permis de demander et de rendre le devoir conjugal pendant le temps que la femme allaite, car l’expérience prouve que le lait est rarement corrompu par suite de cet acte. Sanchez, l. 9, disp. 22, no  14, et St Ligori, l. 6, no  911.

VI. Il n’est pas permis de refuser le devoir conjugal dans la crainte d’avoir un trop grand nombre d’enfants : les époux chrétiens doivent se confier à Dieu qui donne la nourriture aux animaux et à leurs petits lorsqu’ils l’invoquent (Ps. 146, 9) ; en bénissant la fécondité, il bénit souvent aussi les biens temporels et spirituels en permettant que, parmi les enfants, il en naisse un qui apporte dans la maison des dots importantes et qui fasse le bonheur de toute la famille.

Cependant, pour le cas où les parents n’auraient pas les moyens de nourrir selon leur condition une famille trop nombreuse, Sanchez, l. 19, disp. 25, no  3, et plusieurs autres théologiens pensent qu’il serait permis de refuser le devoir, pourvu qu’il n’y eût pas danger d’incontinence : mais comme l’époux qui refuse le devoir ne peut presque jamais savoir si celui qui le demande n’est pas en danger d’incontinence, le confesseur doit rarement permettre de le refuser sous ce prétexte-là. Il doit toujours exiger que la continence résulte d’un consentement mutuel, et, nonobstant la résolution de rester dans une parfaite continence, chacun des époux doit être prêt à rendre le devoir à celui qui le demande.

VII. La femme qui, du consentement de son mari, prend un enfant étranger à nourrir, est dispensée de rendre le devoir pendant le temps qu’elle nourrit, car si le lait d’une femme enceinte ne nuit pas ordinairement à son propre enfant, il n’en est pas de même pour l’enfant d’un autre. Ceux qui donnent des enfants à nourrir se montrent souvent contrariés de l’événement, si la nourrice devient enceinte pendant l’allaitement du nourrisson.


§ III. ― De ceux qui pèchent mortellement en rendant le devoir conjugal


I. Si l’époux qui réclame de son conjoint le devoir commettait un péché mortel en le demandant au milieu de circonstances extraordinaires tenant à l’acte lui-même, par exemple, en le demandant dans un lieu public ou sacré, ou avec grave danger d’avortement, ou au détriment de sa propre santé ou de celle de son époux, ou au risque évident de répandre la semence hors du vase naturel, alors qu’il aurait pu pratiquer le coït d’une autre manière, il est certain que celui qui rendrait le devoir dans