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validité, il doit rejeter ces doutes comme des scrupules, et il peut demander le devoir conjugal, s’il vient à s’apercevoir que ces doutes ne sont fondés sur aucune raison ; si au contraire il s’aperçoit qu’ils reposent sur des raisons qui ont quelque fondement, il doit, pour ne pas se mettre en danger de fornication, s’abstenir de demander le devoir conjugal jusqu’à ce qu’il ait acquis la certitude de la validité du mariage. Mais il est tenu de rendre le devoir à son époux qui n’est pas dans le doute, parce que, de deux maux qu’on ne peut éviter à la fois, il faut choisir le moindre : Or il y a moins de mal à s’exposer au danger d’une fornication matérielle qu’au danger d’une injustice envers l’autre époux. Ces décisions se trouvent dans le livre et au chapitre que nous avons cité plus haut.

On suppose ici qu’il n’existe pas des raisons légitimes pour refuser le devoir conjugal ou pour s’y soustraire, car, dans le cas où ces raisons existeraient, on ne serait pas tenu de rendre le devoir, puisqu’il n’y aurait plus danger d’injustice. De même, dans le cas où les arguments pour la nullité du mariage seraient beaucoup plus concluants que les arguments contraires, il ne serait pas permis de rendre le devoir, car on commettrait très certainement un péché de fornication. Voy. Dens, t. 7.

Il résulte de ce que nous venons de dire que si les deux époux doutaient de la validité du mariage, ils ne pourraient, ni l’un ni l’autre, ni demander ni rendre le devoir conjugal.


§. II. — De ceux qui pèchent véniellement en exigeant le devoir conjugal


I. Quelques théologiens, dont St Ligori, l. 6, no  915, cite l’autorité, prétendent, après St Thomas, que c’est un péché mortel de pratiquer le coït avec sa femme pendant le temps des menstrues, c’est-à-dire de l’écoulement du sang qui se produit ordinairement chaque mois chez les femmes capables de devenir enceintes, à cause du préjudice causé à l’espèce, et de la défense divine portée dans le Lévitique, 20, 18 ; mais d’autres enseignent plus ordinairement que c’est bien là un péché à cause de l’indécence qui en résulte, ils accordent qu’il n’est que véniel, car le coït pratiqué à l’époque des menstrues ne nuit nullement ou du moins nuit bien peu à la propagation de l’espèce ; d’ailleurs la défense portée dans le Lévitique a été, comme pratique, abrogée par la loi nouvelle. C’est l’opinion de St Antoine, Navarrus, Concina, Pontius, Bonacina, Paludanus, Cajetan, Sylvius, Billuart, Dens, etc. Il n’y a nul péché à demander le devoir lorsque cette demande est justifiée par une cause raisonnable, une grave tentation, par exemple, ou la nécessité de prévenir l’incontinence.

Voy., dans ce sens, Navarrus, Paludanus, Sanchez, l’école de Salamanque, St Ligori.

C’est pour cela que si l’écoulement, qui ne dure pas ordinairement au delà de deux ou trois jours, était de trop longue durée et presque continuel, comme cela arrive quelquefois, le mari pourrait, sans péché, demander le devoir, car il serait très-grave pour lui de toujours s’abstenir.

Selon l’opinion générale, la femme qui rend le devoir pendant le temps du flux ordinaire ne commet pas de péché ; bien plus, elle est tenue de le rendre si son mari n’adhère pas à des observations faites avec douceur, à moins qu’il ne dût en résulter un grave préjudice, comme cela arrive d’ordinaire lorsque le flux est abondant.

Ce qui vient d’être dit du temps des menstrues s’applique également au temps de la grossesse et du flux de l’enfantement. Voy. St Ligori, l. 6.

II. Ce n’est pas un péché mortel de demander le