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plus la plaidoirie d’un avocat, si ardent qu’on le suppose. C’est maintenant Pascal lui-même, seul en face de la Compagnie.

Une nouvelle lutte avait, de fait, succédé à la querelle d’Arnauld. Émus des doctrines que signalaient les Provinciales, les curés se concertaient pour déférer à l’Assemblée générale du clergé de France les propositions signalées. De leur côté, les jésuites, silencieux pendant plusieurs mois, ripostèrent quand Pascal en vint à flétrir la casuistique. Ils publièrent réponse sur réponse, et se défendirent en attaquant à leur tour celui qu’ils appelaient le secrétaire de Port-Royal. Ils lui reprochaient de rendre à dessein ridicules les choses sacrées, de faire appel aux instincts lubriques des lecteurs ; de citer inexactement, de rendre les jésuites responsables de doctrines communément reçues et antérieures à ces Pères, d’attribuer à toute la Société les paradoxes de quelques individus plus ou moins obscurs.

Pascal sent s’éveiller en lui une indignation, une vigueur nouvelles. Ce que j’ai fait jusqu’ici, répondit-il en reprenant un mot de Tertullien, n’est qu’un jeu avant le véritable combat. Il va se défendre sans ménagements, découvrant jusqu’au fond la perversité de ses adversaires.

Comment osez-vous dire que j’ai tourné en raillerie les choses saintes ? Est-ce rire de la religion que de rire de ceux qui la profanent ? Serait-il donc défendu de combattre l’erreur par la moquerie ? De même que la vérité est digne, non seulement d’amour, mais de respect ; ainsi l’erreur renferme, avec l’impiété qui la rend horrible, l’impertinence qui la