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La notion de longueur rectiligne[1] présente certains caractères qui la rapprochent de la notion de nombre.

Étant données deux longueurs (deux segments de droites) et quelconques (fig. 2, on peut dire si elles sont égales ou inégales : elles sont égales (ou congruentes) si elles sont exactement superposables, c’est-à-dire si, en déplaçant l’une d’elles, on peut l’amener à coïncider avec l’autre ; lorsqu’elles sont inégales, on peut dire laquelle est la plus grande ; on peut faire la somme ou la différence de deux longueurs en les plaçant bout à bout le long d’une même droite : enfin on peut diviser une longueur donnée en un nombre donné de parties égales. Ce sont ces caractères arithmétiques[2] des longueurs qui nous permettront de les mesurer.

Nous retrouverons les mêmes caractères arithmétiques (donnant lieu aux mèmes opérations) chez les diverses grandeurs qu’étudie la géométrie. Montrons-le par quelques exemples fondamentaux.

54. Angles. – On appelle angle la figure formée par deux demi-droites[3] issues d’un même point Ces demi-droites sont appelées côtés de l’angle ; le point est appelé sommet. Marquant sur la première demi-droite un point quelconque sur la seconde demi-droite un point quelconque je puis regarder l’angle comme

  1. On remarquera qu’une longueur rectiligne telle que est indépendante de la position particulière qu’occupe dans l’espace le segment de droite Si nous déplaçons ce segment et lui faisons occuper des positions diverses, nous avons toujours affaire à une seule et même longueur. Au contraire, par les mots « droite », « segment rectiligne », nous entendons toujours une droite ou un segment situés dans l’espace.
  2. Nous passons sous silence les caractères fondamentaux qui sont, pour le sens commun, inséparables de la notion de longueur, mais qu’Euclide et les géomètres grecs prenaient soin d’énumérer sous forme d’axiomes et que les logiciens contemporains ont analysés avec plus de précision encore. Ainsi : Les grandeurs égales à une même grandeur sont égales entre elles ; si à des grandeurs égales on ajoute des grandeurs égales, les touts seront égaux ; et ainsi de suite les exemples que nous citons sont les deux premiers axiomes, ou notions communes, κοιναὶ ἐννοίαι d’Euclide. Nous reviendrons plus loin sur ces axiomes (voir Deuxième liv., chap. v et Troisième liv., chap. ii).
  3. Étant donnée une droite qui passe par un point cette droite peut être prolongée indéfiniment de part et d’autre du point J’appelle demi droite la portion de la droite qui est située tout entière, soit à droite, suit à gauche du point