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CHAPITRE III

LES FIGURES
1. – Le monde des notions géométriques

164. Grandeurs et figures. – En rapprochant au début de an notre second chapitre la géométrie de l’arithmétique, en faisant une étude comparée de ces deux sciences sœurs dans leur domaine frontière, nous avons vu nettement en quoi consiste le point de vue proprement géométrique[1]. Les grandeurs, nous l’avons dit, n’intéressent le géomètre qu’en tant qu’elles ont elles-mêmes une figure. Ainsi, lorsque le géomètre emploie le mot « égalité », c’est toujours de l’égalité de figure qu’il veut parler (vide no 55); la notion d’égalité de grandeur ne satisfait son esprit que si, par des combinaisons de figures, il peut la ramener à la notion de superposition. De même, une opération effectuée sur des grandeurs est toujours, pour le géomètre, une construction[2] : partant de figures données, que l’on relie entre elles au moyen de droites, de cercles ou d’autres lignes connues, on construit une figure nouvelle appelée résultat de l’opération. L’élaboration d’une théorie purement quantitative des grandeurs est le fait de l’arithméticien et de l’algébriste, non du géomètre. Dans une telle théorie, même, convient-il d’éliminer tout ce qui a trait à la figure ? Doit-on et peut-on raisonner sur des grandeurs ou quantités entièrement dépouillées de forme géométrique ? Il serait audacieux de le prétendre

  1. Sur le mot « géométrie », voir p. 62, note i.
  2. Supra, chap. ii, § 3, passim et infra, chap, iii, § 5. Bien entendu il ne s’agit pas là d’une construction physiquement réalisée, mais d’une construction idéale.