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HISTORIQUE.

romaine et l’invasion des barbares, cet art fut entièrement perdu pour ces pays.

Voici quelles ont été, un peu partout, les principales phases du développement de l’art de la panification :

Le fruit des céréales a d’abord été consommé cru, puis on a eu l’idée de le broyer avec des pilons de pierre dans des mortiers de bois et de faire, avec la farine obtenue, une sorte de bouillie. Peu à peu on donna à cette bouillie une consistance plus épaisse et on finit par faire une véritable pâte qui, réduite en minces gâteaux et cuite, fournissait un aliment précieux en ce qu’il pouvait être préparé en provision et transporté au loin. Ces gâteaux n’étaient pas encore du pain, puisqu’ils n’étaient pas fermentés, mais de bonne heure on sut tirer parti de la fermentation pour alléger la pâte et obtenir un aliment plus sapide et plus salubre. Ce progrès paraît avoir été réalisé d’abord par les Chinois. En tout cas, les Hébreux possédaient cet art au temps d’Abraham, car dès cette époque nous voyons dans la Genèse distinguer le pain, sans épithète, panis, du pain azyme, azyma. À l’époque de Moïse, l’emploi du levain est explicitement indiqué dans la Bible. Les Hébreux, poursuivis par les Égyptiens, furent obligés de se nourrir de pains azymes cuits sous la cendre, parce qu’ils n’avaient pas eu le temps d’introduire le levain dans leur pâte au moment de leur départ[1].

  1. « Tulit igitur populus conspersam farinam antequam fermentaretur… coxeruntque farinam, quam dudum de Ægypto conspersam tulerant : et fecerunt subcinericios panes azymos : neque enim poterant fermentari cogentibus exire Ægyptiis, et nullam faccre sinentibus moram ». (Exod., XII, 34, 39.)