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tingué et pour ainsi dire de relevé, et d’un plus haut goût dans nos perceptions, nous serions toujours dans l’étourdissement. Et c’est l’état des Monades toutes nues.

25. Aussi voyons-nous que la Nature a donné des perceptions relevées aux animaux, par les soins qu’elle a pris de leur fournir des organes, qui ramassent plusieurs rayons de lumière ou plusieurs ondulations de l’air, pour les faire avoir plus d’efficace par leur union[1]. Il y a quelque chose d’approchant dans l’odeur, dans le goût et dans l’attouchement, et peut-être dans quantité d’autres sens, qui nous sont inconnus. Et j’expliquerai tantôt[2], comment ce qui se passe dans l’âme représente ce qui se fait dans les organes.

26. La mémoire fournit une espèce de consécution aux âmes, qui imite la raison, mais qui en doit être distinguée. C’est[3] que nous voyons que les animaux, ayant la perception de quelque chose qui les frappe et dont ils ont eu perception semblable auparavant, s’attendent par la représentation de leur mémoire à ce qui y a été joint dans cette perception précédente et sont portés à des sentiments semblables à ceux qu’ils avaient pris alors. Par exemple : quand on montre le bâton aux chiens, ils se souviennent de la douleur qu’il leur a causée et crient et fuient (Prélim.[4], § 65).

27. Et l’imagination forte qui les frappe et émeut, vient ou de la grandeur ou de la multitude des per-

  1. Ce qui existe dans le corps est le signe, non la cause, de ce qui existe dans l’âme, ainsi que Leibnitz l’expliquera au paragraphe 78, lequel traite de l’harmonie préétablie.
  2. V. inf., §§ 62 et 78.
  3. Tel est le texte des manuscrits. La traduction latine reproduite dans l’édition Dutens porte : « Videmus ideo ».
  4. C’est-à-dire : « Discours de la conformité de la Foi avec la Raison. »