gèbre. Or il y a, croyons-nous, antinomie entre les exigences de cette méthode et certaines spéculations qui s’imposent à l’esprit du mathématicien.
Ainsi nous sommes amenés à attacher une importance de plus en plus grande à ce conflit, intérieur à la science mathématique, que nous avons cherché plus haut à mettre en évidence, — conflit que les mathématiciens professionnels auront peut-être quelque peine à expliquer, mais dont ils ont, en maintes occasions, un sentiment très net et très vif.
Or, circonstance remarquable, si au lieu de nous attacher aux vues de M. Le Roy sur les théories mathématiques, nous envisageons l’ensemble de sa doctrine, nous y trouvons l’indication d’un conflit analogue. M. Le Roy admet, lui aussi, que l’esprit humain n’agit pas librement, mais qu’il est contraint dans ses créations, qu’il est obligé de tenir compte de nécessités qui lui sont étrangères. Il pense, comme nous, qu’il y a un désaccord irréductible entre la matière et l’instrument de notre connaissance. Mais M. Le Roy place autrement que nous la coupure qui divise le domaine de la connaissance discursive de celui des données objectives. Pour M. Le Roy, la science toute entière appartient au premier domaine, et le philosophe seul a le privilège d’entrer en contact avec la réalité, avec le donné primitif. Sans doute « il y a dans les faits un résidu mystérieux d’objectivité[1] ». Sans doute, si la connaissance humaine est par un certain côté « construction », elle est, par un autre, découpage, « morcelage » d’une matière étrangère. Mais la science, « occupée seulement du morcelage caractéristique de son point de vue », ne considère pas cette matière. C’est à la critique philoso-
- ↑ Art. cité, Revue de Métaphysique, 1899, p. 518.