et qu’elle les supplantera en effet ; que, par l’intermédiaire de la notion de fonction, elle va révolutionner et régénérer toutes les sciences qui sont en relation avec l’espace et le temps.
Pour Fermat, comme pour ses prédécesseurs, les questions relatives aux figures sont des questions de géométrie : si l’algèbre y intervient, ce n’est qu’à titre d’adjuvant et par procuration. Avec Descartes, c’est l’algèbre qui passe au premier plan : l’algèbre, avec tous ses caractères spécifiques que nous avons fait ressortir plus haut.
Nous avons dit que l’algèbre n’est pas un recueil de résultats, mais bien une méthode de combinaison et de construction. Appliquée à l’étude des figures, cette méthode permettra de reconstruire de toutes pièces la géométrie en faisant table rase des connaissances que nous a léguées l’antiquité. Nous l’édifierons sur un plan nouveau, mieux ordonné et beaucoup plus vaste que l’ancien. Car, après avoir dit, par exemple : « les droites sont les figures définies par les équations polynomales du premier degré en x et y (de la forme ax + by + c = 0) ; les sections coniques sont les courbes définies par les équations polynomales du second degré en x et y (de la forme ax² + bxy + cy² + dx + ey + f = 0) », rien ne nous empêchera d’ajouter : « j’appelle courbes du 3e ordre les courbes définies par les équations polynomales du 3e degré en x et y, courbes du 4e ordre les courbes définies par les équations polynomales du 4e degré en x et y, … ; et des équations de ces courbes je vais déduire leurs propriétés, ainsi que je l’ai fait pour les sections coniques. » Ainsi, par le simple jeu du mécanisme algébrique, nous faisons surgir un monde géométrique illimité que ne nous eût jamais révélé l’intuition directe de la figure.