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rale est contingente, la proposition particulière qui s’en déduit est, comme telle du moins, également et nécessairement contingente. On ne peut parvenir, par le syllogisme, à la démonstration d’une nécessité réelle, que si l’on rattache toutes les conclusions à une majeure nécessaire en soi. Cette opération est-elle compatible avec les conditions de l’analyse ?

Au point de vue analytique, la seule proposition entièrement nécessaire en soi est celle qui a pour formule A = A. Toute proposition dans laquelle l’attribut diffère du sujet, comme il arrive alors même que l’un des deux termes résulte de la décomposition de l’autre, laisse subsister un rapport synthétique comme contre-partie du rapport analytique. Le syllogisme peut-il ramener les propositions synthétiquement analytiques à des propositions purement analytiques ?

Une différence se manifeste au premier abord entre les propositions sur lesquelles opère le syllogisme et celle à laquelle il s’agit d’arriver. Dans celle-ci, les termes sont reliés par le signe = ; dans les autres, par la copule est. Cette différence est-elle radicale ?

La copule est, que l’on emploie dans les propositions ordinaires, n’est peut-être pas sans rapport avec le signe =. Elle signifie, en se plaçant au point de vue de l’extension des termes (lequel est le point de vue du raisonnement), que le sujet n’exprime qu’une partie de l’attribut, partie dont on n’indique pas la grandeur relative. La proposition « Tous les hommes sont mortels » signifie que l’espèce « homme » est une partie du genre « mortel », et laisse indéterminé le rapport du nombre des hommes au nombre des mortels. Si l’on connaissait ce rapport, on pourrait dire : « Tous les hommes = mortels. » Le progrès de la science, peut-on ajouter, consiste à déterminer plus exactement et plus complètement les espèces contenues dans les genres, en sorte