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pondant aux variations d’une même qualité psychique. Supposons que l’on étudie à ce point de vue le souvenir. On aurait à dresser le tableau suivant, étant une quantité de souvenir et une quantité de mouvement ; , , étant des valeurs particulières données de , et , les valeurs correspondantes de  :



De là on déduirait .

Mais comment se donner , , etc. ? Le souvenir, pas plus que l’âme elle-même, n’est une qualité simple. Il embrasse la netteté, la vivacité, la complexité, l’exactitude, la précision, l’éloignement dans le passé, le sentiment de l’identité personnelle, la conscience d’avoir déjà conçu l’idée en question, etc. La valeur du souvenir est déterminée précisément par la présence, l’absence et les degrés de ces diverses qualités. Il faudrait donc renoncer à mesurer d’abord un tout aussi complexe que le souvenir, dont les valeurs, par suite de cette complexité, ne sont pas des quantités de même nature. Il faudrait chercher des qualités simples et exactement définies, analogues à l’étendue et au mouvement ; déterminer l’équivalent mécanique de chacune de ces qualités, et trouver ensuite un rapport numérique entre ces qualités considérées isolément et les résultats de leurs combinaisons. Or il serait impossible d’exécuter une telle entreprise scientifiquement, c’est-à-dire sans faire intervenir le tact, le jugement, le sentiment, en d’autres termes, cette appréciation directe de la qualité qu’il s’agit précisément de suppléer. Rien ne prouve d’ailleurs que les quali-