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d’associations psychiques. Pour établir de pareilles lois, Locke et ses disciples ont dû se représenter les faits psychiques d’une manière tout à fait artificielle. Ces faits sont, pour eux, des éléments indivisibles liés entre eux du dehors comme les éléments de la matière dans l’atomisme. Mais comment se représenter, comment concevoir un élément psychique indivisible ? Où, dans ce domaine, trouver des matériaux fixes, définis, se juxtaposant et se dissociant comme les pierres d’un édifice ? Ce qui présente des propriétés de ce genre, ce sont les mots et les lettres. La psychologie associationniste prend les données du langage pour les éléments de la vie intérieure, dont ils ne sont qu’une grossière représentation.

Mais, dira-t-on, les sciences les plus parfaites ne supposent-elles pas des artifices et des symboles ? Certes, et ceux-ci se légitiment par les services qu’ils rendent. Ainsi, en chimie, l’hypothèse des atomes conduit à des conséquences que l’on peut, par des expériences précises, confronter avec les faits. En psychologie, rien de tel, car on ne peut construire un assemblage mécanique d’idées, et mettre en présence des faits les résultats d’une déduction rigoureuse. La synthèse, ici, ne fait jamais que reproduire une analyse plus ou moins exacte et approfondie. La démonstration n’est jamais qu’illusoire.

Prises pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire pour de simples traductions métaphoriques des relations psychologiques, les lois d’association ont cet inconvénient d’être singulièrement vagues. Elles semblent se réaliser parce qu’elles impliquent fort peu de chose. Une idée est en général précédé d’une autre idée; comme l’associationnisme n’exige pas le moindre rapport logique entre [117]