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414 ÉTUDES D’HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE

par un auteur, pour convaincre aussitôt celui-ci de médiocrité comme si la vie de l’esprit, aussi bien que celle du corps, n’était pas un continuel échange, et comme si le plus sûr moyen de sécher dans la stérilité n’était pas de s’enfermer en soi et de prétendre se suffire. On est original quand on fait sien ce qu’on emprunte. La philosophie en particulier s’est souvent renouvelée grâce à des influences étrangères : témoin le rôle joué par Aristote au moyen âge, ou l’action de Hume sur Kant dans les temps modernes. N’est-ce pas la loi de nature, que les hommes s’entr’aident dans la recherche de la vérité comme dans le soin de la vie matérielle ?

L’un des exemples les plus remarquables de ces fécondes relations intellectuelles est l’action exercée par la philosophie écossaise sur la philosophie française dans la première moitié de ce siècle. Si cette influence n’a pas suscité un mouvement comparable aux grandes révolutions de la pensée, elle n’en a pas moins provoqué une activité nouvelle, dont les suites se font sentir aujourd’hui encore. Dans quelles conditions ces relations se sont-elles produites, c’est ce que la présente étude a pour objet de rechercher.


I

Dès le xviiie siècle, à vrai dire, la France s’intéressait aux travaux des Écossais. Une traduction française de