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Descartes, ainsi que Bacon, retient de la tradition des alchimistes et des magiciens l'ambition de dominer cette nature, que les anciens s'étaient bornés à contempler. Mais les alchimistes croyaient, que, pour la faire agir à leur gré, il suffisait de la mettre en branle par une imitation tout empirique et extérieure de ses procédés. Les [505] magiciens s'en approchaient comme d'une puissance mystérieuse et peut-être diabolique, dont il s'agissait d'enchaîner la volonté par des formules. Bacon lui-même, dans sa poursuite directe d'une philosophie active, n'a aucune raison d'admettre que la nature répondra aux sollicitations de l'homme, sinon qu'il le faut ainsi pour que l'homme puisse agir sur elle. Sa science est aveugle, parce qu'elle est purement et simplement ramenée à l'action . L'originalité de Descartes fut de juger que la légitimité du problème restait incertaine et la solution toujours douteuse, tant qu'on renonçait à savoir par quelle opération interne la nature tirait tel effet de telle cause. Il estima que la pratique supposait la théorie dans le sens propre de ce terme, la connaissance de l'intérieur des choses. C'est de ce biais, selon lui, qu'il fallait considérer la nature, si l'on voulait réussir à en devenir