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18 LES TYPOGRAPHES.

plus grande partie de sa vie. Citons d’abord Balzac ; nous ne saurions prendre un guide plus sûr et en même temps plus exact. Voici en quels termes il décrit, dans son roman intitulé Illusions perdues, l’établissement de David Séchard, à Angoulême : « L’imprimerie située dans l’endroit où la rue de Beaulieu débouche sur la place du Mûrier, s’était établie dans cette maison vers la fin du règne de Louis XIV. Aussi depuis longtemps, les lieux avaient-ils été disposés pour l’exploitation de cette industrie. Le rez-de-chaussée formait une immense pièce éclairée sur la rue par un vieux vitrage et par un grand châssis sur une cour intérieure. On pouvait d’ailleurs arriver au bureau du maître par une allée. Mais en province, les procédés de la typographie sont toujours l’objet d’une curiosité si vive, que les chalands aimaient mieux entrer par une porte vitrée pratiquée dans la devanture donnant sur la rue, quoiqu’il fallût descendre quelques marches, le sol de l’atelier se trouvant au-dessous du niveau de la chaussée. Les curieux ébahis ne prenaient jamais garde aux inconvénients du passage à travers les défilés de l’atelier. S’ils regardaient les berceaux formés par les feuilles étendues sur des cordes attachées au plancher ils se heurtaient le long des rangs de casses, ou se faisaient décoiffer par les barres de fer qui maintenaient les presses. S’ils suivaient les agiles mouvements d’un compositeur grappillant ses lettres dans les cent cinquante-deux cassetins de sa casse, lisant sa copie, relisant sa ligne dans son composteur en y glissant une interligne, ils donnaient dans une rame de papier trempé chargé de