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6 LES TYPOGRAPHES.

un metteur en pages reprendre la casse et lever la lettre comme à ses débuts. Nous avons connu un ancien metteur du Moniteur universel que le décret de M. Rouher a atteint en retirant à ce journal sa qualité officielle, et qui, plus tard, pompait les petits clous à la pige comme les camarades, côte à côte avec ses anciens paquetiers : il était redescendu au rang de simple plâtre, après avoir durant des années émargé les appointements d’un préfet de première classe.

L’importance des fonctions de prote et le rôle prépondérant qu’il joue dans l’atelier typographique nous engagent à écrire tout d’abord la monographie de ce personnage.

Dans les premiers siècles de l’imprimerie, les fonctions de maître imprimeur, de prote et de correcteur, remplies aujourd’hui par trois personnes différentes, étaient exercées par le même individu. C’était d’ordinaire un savant de premier ordre, connaissant l’hébreu, le grec, le latin et quelques langues vivantes, les sciences, et, de plus, fort expert dans l’art typographique. Il nous suffira de citer quelques noms de maîtres imprimeurs qui furent en même temps protes et correcteurs : Nicolas Janson, graveur à la Monnaie de Tours, envoyé à Mayence par Charles VII pour étudier le nouvel art, et qui plus tard s’établit à Venise ; Alde Manuce, à Venise ; les Junte, à Florence ; Guillaume Le Roy, à Lyon ; les Plantin, à Anvers ; les Caxton, en Angleterre ; Conrad Bade, à Genève ; les Elzevier, à Leyde ; Simon Vostre, Antoine Verard, Simon de Collinée, les Estienne, le malheureux Dolet, les Didot, en France. Aussi ne se lasse-t-on