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plein de délicatesses infinies, qu’on aurait essayé de traduire dans la langue primitive, rude et brutale d’une horde de sauvages.

Vous voyez toutes les raisons que nous avons de ne pas croire que les images que nous construisons avec les mots s’appliquent exactement aux choses que ces mots signifient.

S’il ne vous déplaît pas de me suivre encore quelques minutes, nous allons retrouver dans le jugement les mêmes imperfections, les mêmes causes d’erreur et d’impropriété que nous avons observées dans le mot.

Il y a une première forme de jugement ; elle consiste à prendre un homme, Eutychès ou Strabon, à détacher de cet ensemble concret une qualité comme celle de bon, de raisonnable, de mortel et à faire passer ces qualités de l’autre côté de la copule « est » par laquelle est constitué tout jugement. On aboutit ainsi à une proposition qui a deux défauts, ou pour mieux dire deux insuffisances : 1° elle est trop simple ou trop pauvre, puisqu’elle a dans un de ses membres la totalité des attributs qui constituent le type humain, plus ceux de l’individu, Eutychès ou Strabon, et dans l’autre membre