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la terreur en macédoine

écoulées.

Un bruit de tonnerre lui coupe la parole et remplit d’effroi son âme jusqu’alors inaccessible à la crainte. Ce bruit arrive aux oreilles des travailleurs à travers les couches de la terre. Il s’amplifie, grandit encore et se précise.

« Malédiction ! s’écrie Joannès ; des chevaux… ce sont des chevaux qui galopent… ils arrivent…

— Tenez bon, camarades ! hurle Panitza.

— Hisse là !… hisse ! » crie Joannès d’une voix terrible.

Les vingt-cinq hommes, le sang aux yeux, les muscles contractés à se rompre, le cœur battant, donnent une secousse irrésistible. Telle est la force de leur élan, que tout vient en grand et qu’ils tombent à plat ventre, en grappe.

Ce galop furieux, Marko l’entend, lui aussi. Des cris féroces, ponctués, de coups de feu, retentissent, le brigand se jette à la porte avec une joie sauvage qui confine à la démence.

« Les voilà !… les voilà !… mes braves camarades… mes fidèles Albanais ! »

Un peloton d’au moins quarante hommes arrive au triple galop, manteaux au vent, faces convulsées, armes brandies, avec des éclats de poudre, comme l’épique envolée d’une fantasia.

En tête, le flanc troué d’un point rouge d’où suinte un mince filet de sang, bondit le léopard. Derrière le félin s’avance un homme d’une quarantaine d’années, grand, maigre, la face coupée d’une grosse moustache noire…

« Mathisévo ! s’écrie Marko.

— Présent ! répond l’homme en arrêtant net son cheval.