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la terreur en macédoine

elle ramasse son fusil et lentement se dirige vers la porte.

De la crosse, elle frappe rudement le panneau de métal qui résonne avec des roulements de tonnerre. Au dedans rien ne bouge, et l’huis rébarbatif demeure obstinément clos.

Là-bas, Marko et ses cavaliers ont mis pied à terre. Ils s’avancent en gens que rien ne presse et sûrs d’arriver à temps.

Nikéa frappe un second, puis un troisième coup. La porte ne s’ouvre pas, mais une petite meurtrière, juste suffisante au passage d’un fusil, apparaît au milieu du panneau. Soudain, la voix de Nikéa s’élève dans le silence tragique, succédant aux coups bruyants de la crosse sur le fer. Cette voix admirable chante la terrible cantilène de Kossovo, que les Slaves ne peuvent entendre sans frissonner jusqu’aux moelles !

« Kossovo ! Kossovo sanglant !… »

« Tu es la Plaine où le sol ruissela… Tu as bu le sang généreux des héros !… des héros qui succombèrent en défendant le sol sacré… le sol rougi de la Patrie mourante. »

« Jean Korvin… Iskander… où êtes-vous ! »

Il y a un moment de silence poignant, pendant lequel les patriotes sentent leur cœur battre à défoncer leur poitrine.

Enfin, une voix cassée de vieillard demande, derrière la porte :

« Femme !… qui es-tu… toi qui chantes ainsi les malheurs de la patrie asservie, et qui mouilles nos yeux ?…

— Regarde-moi ! reconnais-moi !…

« Je suis celle qui exigea la vie et la liberté des trois