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la terreur en macédoine

De sa main crispée il arrache, du fourreau son cimeterre dont la lame flamboie. Puis il rugit :

« Oh ! pour cette insulte… il me faut ta vie miette à miette… ta chair fibre à fibre… ton sang goutte à goutte !… »

Très pâle, mais plus calme que jamais, Joannès, pour la troisième fois, lance le mot atroce qui claque comme un soufflet :

« Lâche !… car tu insultes des prisonniers sans défense. »

Évidemment, il veut le mettre à bout. Il cherche à provoquer en lui un de ces élans furieux de colère irrésistible, qui font voir rouge et poussent à l’homicide.

Alors, plus de supplices raffinés, plus de tortures savantes, mais la mort brutale, instantanée, libératrice, pour les trois malheureux que rien ne peut sauver !

Tous, parmi les spectateurs, s’attendent à voir voler, dans un éclair sanglant, la tête de Joannès.

Marko recule d’un pas. La main qui brandit le cimeterre s’abaisse lentement. On dirait qu’instinctivement le bey ébauche, avec une gravité hautaine et très noble, le salut des armes.

Alors, la gorge encore serrée, la poitrine houleuse, la parole entrecoupée, il tâche de se ressaisir par un effort énergique de volonté, mais aussi de dignité.

« Tu es brave ! dit-il enfin d’un ton moins rude, avec une sorte de déférence dans la voix.

— Je suis homme, et je vais mourir !

« Je ne demande ni grâce ni pitié… mais est-ce trop que d’exiger le respect de cette chose formidable et sacrée : la mort !