plus rien, car ton amour sera ma sauvegarde et ma force…
— Toujours cette crainte !… toujours ce martyre de la pensée !… Mais, chère âme, ne suis-je pas là désormais pour bannir ces terreurs ?
— Ah ! tu ne sais plus… toi qui reviens de si loin et après si longtemps !…
« Oh ! ce n’est pas un reproche ; mais tu as pu oublier le fléau de notre race, si douce et si aimante, si bonne et si laborieuse !
— Le Turc… l’Albanais !… surtout l’Albanais ! qu’importent désormais ces pillards dans ce grand mouvement qui émancipe aujourd’hui les hommes et les nations ?
« J’estime qu’il est temps de résister à leurs caprices de tyrans, à leurs violences de brutes.
— Non, tu ne sais plus et tu ignores l’état de nos âmes… Sache bien que tu serais seul… que nous serions seuls tous deux à lutter.
« Les autres n’oseraient pas !
— Nous sommes pourtant le nombre et nous avons pour nous la force et le droit.
— Ils n’oseraient pas, te dis-je !
« Songe aux siècles de terreur accumulés sur leurs têtes.
— Que faire, chère âme ?… que faire ?…
— Nous résigner… encore !
« L’impôt est dur… il est injuste… il est écrasant… et pourtant notre labeur saurait y pourvoir… Oui… travailler, se résigner pour être heureux… comme le furent nos pères… malgré l’incessante menace des gens de la montagne.
— Tu le veux ?