tion, elle était inondée d’une clarté si vive que ma
pensée n’en pouvait plus sortir.
J’étais ému. Sans prendre garde à l’étonnement des
filles en cheveux que je heurtais à chaque pas, je
prononçais pour moi seul des paroles que je pouvais
d’un instant à l’autre, cesser de comprendre.
Je me disais : « Mon regard regarde dans son cœur
avec la forme de ce qu’il aime. » Cette pensée en
appelait une autre, aussi obscure, aussi peu faite
pour le grand jour du livre où je l’écris à sa suite et
qui ne retenait mon attention que pour avoir été
éveillée, elle aussi, par la vue de l’Apollon photographié :
« Dans le monde des choses que l’on peut
toucher, il y en a une qui n’est pas faite pour être
vue mais pour être aimée, un faux objet…
« Pour tant que je le caresse ou que je le frappe le
corps que j’aime ne brille jamais qu’au dedans de
moi… »
Il commençait à pleuvoir. Je hélai une voiture. Le
chauffeur avait des yeux de chat-huant dans une
large figure de lessiveuse. Je n’ai jamais pu me souvenir
du moment où j’avais donné à ce fantôme
l’adresse de Monsieur Sureau.
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