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CHAPITRE X


Un appel de Nathalie interrompit le cours de ma divagation. Perdu dans mes tristes pensées, j’avais dépassé ma maison sans la voir ; et je dûs revenir précipitamment vers la porte d’entrée que la vieille fille essayait d’ouvrir. Ainsi eus-je tout le temps de voir à la lumière d’un réverbère que notre servante était cramoisie, congestionnée, me semblait-il, par les vêtements trop étroits et trop lourds que, du commencement à la fin de l’année, elle endossait le dimanche. Mais, ce qui me frappa le plus ce fut l’air irrité qui dominait la rougeur de son teint et semblait me menacer de tout son silence, brûlant comme du feu.
— Qu’avez-vous donc ? lui demandai-je.
— Si vous croyez que c’est agréable de courir la ville, me dit-elle avec fureur, quand le train de 8 heures va passer. Je devrais être à la gare.
— Allez à la gare, allez, répliquai-je aussitôt, ravi de l’éloigner.
Mais nous restions face à face, gênés par la liberté de langage qu’avait mise entre nous notre empressement à nous séparer. Brusquant les choses, je pas-