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malade, qui ne craignait rien tant que la colère, mît sa main sur la mienne, et d’une voix blanche et comme exténuée par le poids d’un aveu, s’écria : « Vous savez bien qu’il y a les pierres, celles qu’on appelle des pierres précieuses, peut-être parce que l’on n’en connaît pas tout le prix. On vous a dit qu’elles faisaient tomber les femmes… Elles sont le destin de celles qui ne les ont pas vues. »


Je devais regretter amèrement d’avoir traité cette affirmation avec légèreté. Quand je déclarai à M. Sureau que je ne croyais pas à la vertu des pierres, à mon grand étonnement, il se hâta de donner dans mon point de vue, comme si je lui avais fourni à la fois l’idée et le moyen de détourner la conversation.
— J’ai voulu frapper votre imagination, me dit-il en riant. Un jour viendra où vous me rappellerez ma boutade. Il arrive que nous marchions au dedans de nous-mêmes. Mais il est besoin d’un objet plus réel que nature, pour forger l’unité de la pensée et de la vie. »
J’eus la maladresse de l’interrompre encore. « Tantôt ce que vous dites m’enchante, Monsieur Sureau et tantôt cela me paraît faux à crier. Pourquoi ne pas me parler maintenant de l’ombre que vous