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Usez bien des moments dont vous estes le maître ; De vos fiers ennemis, trompez l'indigne espoir ; On en veut à vos jours ; la foudre est preste à choir ; À l'abri des lauriers laissez passer l'orage. Il ne m'est pas permis d'en dire davantage : Je vous en dis assez pour vous chasser d'ici. Que perdez-vous en moi pour balancer ainsi ? Seigneur.

Germanicus

Ce que je perds ! l'ignorez-vous, Madame ? Si le fils de César vous arrache à ma flamme ; S'il faut qu'à cet affront le Ciel m'ait réservé ; Je perds ce que le Monde a de plus achevé. Je perds, si la fortune à ce point m'est cruelle, Des plus hautes vertus le plus digne modèle ; Et pour dire encor plus, je perds, enfin, je perds Ce que du sang d'Auguste il reste à l'Univers. Non, Madame, mon coeur plein de votre mérite, Condamne votre amour, s'il veut que je vous quitte : Mon trépas est douteux, et ne le sera plus Si je vous abandonne au pouvoir de Drusus. Rome, quoiqu'on m'apprête, est mon plus sûr asile : Tout autre en vous quittant me serait inutile : Mes jours, que vos bontés ont soin de ménager, Éloigné de vos yeux, sont-ils hors de danger ? Mais c'est trop se livrer à de vaines alarmes ; Rassurez votre esprit, et retenez vos larmes ; Drusus, que mon bonheur a dû rendre jaloux, Cherche par cette ruse à m'éloigner de vous : Je ne sais que lui seul qui m'ose être contraire ; Et pour craindre le fils, je suis trop cher au père. Mon coeur reconnaissant ne peut trop l'avouer, Des bontés de César j'ai lieu de me louer : Il vous rend à mes feux, et je ne puis sans crime,