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Étant né de vos yeux, va mourir par vos mains. Je sais bien que mon coeur, est indigne du vôtre ; Mais, enfin, son rebut sera bon à quelque autre : Et puisque de l'amour vous passez au mépris, J'aurai soin de me rendre à qui vous m'avez pris. La Princesse Émilie, indulgente à mon crime, Apprenant mon remords, me rendra son estime : Obligé pour vous plaire de lui manquer de foi, Vous me coûtiez assez pour devoir être à moi. Vos appas séducteurs corrompirent mon zèle ; Pour me donner à vous, je fus ingrat pour elle ; Et d'un prix assez grand c'est payer vos attraits, Quand il en coûte un crime à qui n'en fit jamais.

Agrippine

Je n'attendais pas, Prince, en un si sort si contraire, Un outrage si grand d'une bouche si chère : Ce reproche est sensible ; et si vous m'aimiez bien, À ma juste douleur vous n'ajouteriez rien. Vous me connaissiez mal, si vous avez pu croire Qu'à l'éclat d'un haut rang j'immolasse ma gloire : Si le sort qui m'outrage eût voulu m'être doux, Ma plus sensible joie eût été d'être à vous. Le bonheur qui m'échappe, est un bonheur insigne, Dont il faut que le Ciel ne me juge pas digne. La Princesse Émilie, exorable à vos soins, Aura plus de mérite, et vous coûtera moins. À des fers qu'il fuyait, ramenez un rebelle : Loin de faire des voeux contre vous, ou contre elle, Je souhaite ardemment, vous ayant enflammé, Qu'elle vous aime autant que je vous eusse aimé. Et pour dernière marque et d'amour, et d'estime, Si mes faibles appas vous coûtèrent un crime, Pour mettre en sûreté vos sublimes vertus, Désormais, par respect, je ne vous verrai plus. À Pison. Ramenez-moi.