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Pour hâter le succès d'une flamme si pure, De vos rares vertus je ferai la peinture : Nommez donc cet objet qui vous a pu charmer ; Et je m'offre moi-même à vous en faire aimer. J'avais peur d'être ingrate, et je me sens ravie De pouvoir vous servir, vous qui m'avez servie ; Ne vous obstinez point à vouloir vous trahir. Parlez.

Pison

Vous le voulez, et je vais obéir. L'adorable Beauté qui captive mon âme, Peut être comparée avecque vous, Madame : Quand je vous aperçois, j'aperçois tous ses traits ; Elle a vos mêmes yeux, et vos mêmes attraits ; Entre vous deux, enfin, la ressemblance est telle, Qu'étant auprès de vous je crois être auprès d'elle : Vos appas et les siens lancent de mêmes coups ; Et pour être aimé d'elle, il faut l'être de vous.

Agripine

De moi, Pison ?

Pison

De grâce ; achevez de m'entendre ; Mais calmez ce courroux, ou daignez le suspendre ; Et d'une âme tranquille, en ce malheureux jour, Punissez mon audace, ou plaignez mon amour. Je vous aime, Madame, et ce mot m'épouvante : Si c'est être coupable, estes-vous innocente ? J'obéis à mon sort, et ne m'en défends pas ; Mais si j'ai de l'amour, vous avez des appas : Cet amour que j'étale a dû peu vous surprendre ; Si vous n'en donniez point, en aurais-je pu prendre ? Et qui des deux, enfin, fait un crime plus grand, Ou de l'oeil qui le donne, ou du coeur qui le prend ?