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V

Un sinistre. — Un drame de famille. — Le maréchal Mortier. — Vingt-sept degrés de froid. — Arrivée à Smolensk. — Un coupe-gorge.


Arrivés à la sortie du bois, et comme nous approchions de Gara, mauvais hameau de quelques maisons, j’aperçus, à une courte distance, une de ces maisons de poste dont j’ai parlé. Aussitôt, je la fis remarquer à un sergent de la compagnie, qui était un Alsacien nommé Mather, à qui je proposai d’y passer la nuit, si toutefois il y avait possibilité d’y arriver des premiers, afin d’avoir chacun une place. Nous nous mîmes à courir, mais lorsque nous y arrivâmes, elle était tellement remplie d’officiers supérieurs, de soldats et de chevaux, qu’il nous fut impossible, malgré tout ce que nous fîmes, d’y avoir une place, car l’on prétendait qu’il y avait plus de huit cents personnes.

Pendant que nous étions occupés à aller de droite et de gauche, afin de voir si nous ne pourrions pas y pénétrer, la colonne impériale, ainsi que notre régiment, nous avaient dépassés. Alors nous prîmes la résolution de passer la nuit sous le ventre des chevaux qui étaient attachés aux portes. Plusieurs fois, ceux qui étaient bivaqués autour vinrent pour la démolir, afin d’avoir le bois avec lequel elle était construite, pour se chauffer et se faire des abris, et de la paille qui se trouvait dans une séparation qu’il faut considérer comme un grenier. Il y avait aussi quantité de bois de sapin sec et résineux.