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AVANT-PROPOS.

Avec les journées de 1830 et le retour des trois couleurs[1], il pense à reprendre du service ; or sa famille jouit de quelque influence à Condé, où son frère est médecin[2]. Alors député de Valenciennes, M. de Vatimesnil, ancien ministre de Louis XVIII et de Charles X, dont il vient de voter la déchéance, ne manque pas d’appuyer un brave ayant neuf campagnes, trois blessures et méconnu par le gouvernement tombé. Comme compensation légitime, il propose sa nomination à l’emploi de major de place, vacant à Condé. La lettre au maréchal Soult, alors ministre de la guerre, est contresignée par les deux autres députés du Nord, Brigode et Morel. La réponse n’arrivant point, M. de Vatimesnil revient à la charge, quinze jours après : « Cette nomination, écrit-il, qui serait excellente sous le rapport militaire, ne serait pas moins utile sous le rapport politique. À une lieue de Condé se trouve le château de l’Hermitage, appartenant à M. le duc de Croy, et où sont réunis beaucoup de mécontents. Loin de moi la pensée de supposer qu’ils aient de mauvaises intentions ! Mais, enfin, la prudence exige qu’une place forte située aussi près de ce château, et sur l’extrême frontière, soit confiée à des officiers parfaitement sûrs. Je vous réponds de l’énergie de M. Bourgogne… » À défaut d’emploi, il demande pour son protégé la croix de la Légion d’honneur.

Mais Bourgogne n’en est pas moins oublié au ministère, où l’on ne retrouve aucune trace de ses services. M. de Vatimesnil est obligé de former un dossier qu’il envoie le 24 septembre. Deux mois après, le 10 novembre, l’ancien vélite est enfin nommé lieutenant-adjudant de place, mais à Brest, et non à Condé ! C’était bien loin, mais enfin il avait un pied à l’étrier, et puis la croix vint, le 21 mars 1831, l’aider à prendre patience, sinon à oublier le sol natal. De nouvelles démarches sont faites pour le poste d’adjudant de place à Valenciennes. Il n’y omet point son titre d’électeur, important alors. Son vœu fut enfin exaucé le 25 juillet 1832, et l’on se souvient encore, à Valenciennes, des services qu’il rendit, notamment pendant les troubles de 1848. Ses droits à la retraite lui valurent, en 1853, une pension de douze cents francs[3].

  1. « En 1830, dit-il dans la note déjà citée, à la réapparition du drapeau tricolore, je rentrai au service. »
  2. Notre sergent avait trois frères et une sœur dont il était l’aîné, savoir : François, un moment professeur de Mathématiques au collège de Condé ; Firmin, mort jeune ; Florence, mariée à un brasseur ; Louis-Florent, docteur en médecine de la Faculté de Paris, mort en 1870. — Marie-Francoise Monnier, leur mère, était née à condé en 1764.
  3. Nous avons trouvé les lettres de M. de Vatimesnil dans le dossier militaire de Bourgogne, aux Archives de la Guerre.