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le portrait ! … » Comment Berthe ne se fût-elle pas dit cela ? Et tout de suite : « Est-ce que cette femme serait à Cannes ? Comme ils ont l’air troublé, Olivier et lui ! »

— « Il est au courant de tout ce qu’elle fait, » avait songé Olivier. « Et ce Corancez, avec quelle familiarité il lui en a demandé des nouvelles !,.. C’est le ton de ces gens-là, pour vous parler d’une femme avec qui vous avez eu une liaison affichée… Une liaison ! … Est-ce possible ? … »

Est-ce possible ? La voix intérieure, exorcisée un moment par la lecture des mots gravés sur la bague, avait recommencé de parler. Elle répondait que cette liaison d’Ely et de Pierre n’était pas seulement possible, qu’elle était probable, qu’elle était certaine… Comme ils étaient peu nombreux pourtant, les faits positifs qui se ramassaient dans cette certitude ! Mais d’autres allaient s’y ajouter tout de suite. Ce fut d’abord une confidence que Pierre lui-même fit à son ami de la part de Corancez, lequel avait bien remarqué la froideur de leur ancien camarade.

— « Tu n’as pas été content de le voir entrer dans notre compartiment ? Il l’a senti. Avoue-le… »

— « Ce sont les mœurs de la côte, » répondit Olivier, « Je trouve qu’il aurait pu épargner leur coudoiement à ma femme, voilà tout. Que Mme Bonaccorsi soie sa maîtresse, tant mieux pour lui… Qu’il nous la présente comme il l’a fait, je trouve cela un peu sans-gêne, voilà tout… »