Cette fois il montrait à son ami, au détour du chemin, la montagne couverte, comme d’une toison, de pins sombres et de mélèzes clairs. Au pied, la ligne des villas se continuait, de Cannes au Golfe-Jouan, puis elle cessait brusquement, et ce n’était plus, jusqu’au faîte, que le foisonnement de la forêt primitive. La mer, à droite, s’étendait libre de toute voile, si bien que, pour une minute, en reportant les yeux de cette montagne verdoyante à cette mer bleuissante, on avait l’illusion du paysage avant la station d’hiver et la vogue. Les deux jeunes gens marchèrent quelque cent mètres encore et ils se trouvèrent en plein bois. Les fûts grisâtres des pins d’Alep s’élevaient maintenant autour d’eux, si serrés qu’à peine l’azur des flots apparaissait au travers. Les feuillages à aiguilles, au-dessus de leurs têtes, se découpaient en plein ciel avec une chaude vigueur. Un arôme de résine, pénétrant et cordial, les enveloppait, auquel se mélangeait par intervalles le parfum frais d’un grand mimosa en fleur. Olivier regardait ce coin de forêt déjà septentrional, comme un voyageur qui revient d’Orient et qui, lassé par des horizons de sable, par cette nature monotonement, implacablement rayonnante, retrouve avec une véritable joie des sens la végétation variée, les tons nuancés du paysage Européen. Hautefeuille, lui, regardait Olivier. Préoccupé jusqu’à l’anxiété par l’énigme de ce mariage qu’il avait admis sans le discuter naguère, il continuait à étudier sur cette physionomie expressive les allées et venues des