Page:Bourget - Une idylle tragique, Plon-Nourrit.djvu/218

Cette page n’a pas encore été corrigée

mio… Il a une adoration pour vous, Andriana. Il vous a écrit un épithalame en cinquante-huit strophes… Pourtant, ce mariage religieux sans mariage civil, ah ! ça lui coûte ! … Qu’aurait dit le comte Camille Cavour, dont il garde pieusement la canne et le portrait chez lui ? … Son Cavour et sa marquise ! Sa marquise et son Cavour ! … Entre les deux, il a choisi sa marquise… Je le comprends. Mais il n’osera plus regarder le portrait et la canne, jusqu’à ce que nous soyons en règle avec la loi Italienne… Je lui ai juré que c’était un retard de quelques jours peut-être ; et puis le prince Paolo l’a rassuré… Un autre type, celui-là. Vous verrez son musée, et dans son musée ce qu’il préfère ! … Mais nous sommes arrivés… »

Le landau venait de s’arrêter devant la haute porte d’un palais à péristyle de marbre, comme ses voisins, et peint comme eux de couleurs vives. Un énorme blason sculpté, sur les balustres du balcon, au premier étage, montrait les trois étoiles des Fregosi, très connues autrefois dans toute la Méditerranée, quand les vaisseaux de la République tenaient la mer contre les Pisans, les Vénitiens, les Catalans, les Turcs et les Français. Un concierge vêtu d’une longue livrée à boutons armoriés, couverte de taches, et qui manœuvrait une canne colossale à pomme d’argent, introduisit les arrivants sous la voûte d’un vestibule d’où partait un escalier énorme. Au fond verdoyait un jardin intérieur, planté d’orangers. Les fruits mûrs brillaient dans le feuillage sombre