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de luxe et de fantaisie. Des terrasses de palais se détachaient, couvertes d’arbustes rares et de statues ; et des villas se répandaient, s’égrenaient le long de la côte, indéfiniment, ici réunies en hameau et formant un faubourg en dehors des faubourgs, là isolées parmi les verdures de leurs jardins. Palais, villas, faubourgs, Marsh les reconnaissait, les uns après les autres, au moyen d’une simple jumelle, qu’il passait ensuite à Yvonne et à son mari :

— « Voici San Pier d’Arena, » disait-il, « Cornigliano, Sestri, à gauche ; à droite, San Francesco d’Albaro, Quarto, Quinto, San Mario Ligure, la villa Gropallo, la villa Serra, la villa Croce… »

— « Mais, commodore, ça vous fait un métier de plus pour le jour de la grande dèche ! » répondait Mme de Chésy en riant. « Vous vous établirez cicérone de mer… »

— « Que voulez-vous ? » reprenait Marsh. « Quand je vois un endroit et que je ne puis ni le situer ni le nommer, c’est exactement comme si je ne voyais rien. »

— « Ah ! que nous ne nous ressemblons guère ! » s’écria Chésy. « Je n’ai jamais pu comprendre une carte de géographie, tel que me voilà ; ce qui ne m’a pas empêché de m’amuser beaucoup dans mes voyages… Croyez-moi, mon cher Dick, nous sommes dans le vrai, nous autres : on a des marins sur mer et des cochers sur terre pour ces besognes… »

Tandis qu’à l’avant du bateau s’échangeaient