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manquer. Pierre avait cru qu’il ne pourrait seulement pas supporter le regard de la baronne, quand il y lirait qu’elle savait son action. Il allait lui-même la lui dire, cette action, et simplement, naturellement, par un irrésistible et passionné besoin d’expier sa faute, s’il était pour quelque chose dans le chagrin qu’il l’avait vue éprouver et qui lui avait fendu le cœur.

— « Monsieur, » commença Ely, après ce silence du début des explications, plus pénible que ces explications mêmes, « je vous ai écrit que nous devions avoir un entretien sur un sujet un peu grave, un peu difficile. Mais je veux d’abord que vous soyez bien convaincu d’une chose : si j’ai à vous dire, au cours de cet entretien, des mots qui vous soient pénibles, croyez-le, cela va me coûter beaucoup… » Elle répéta : « Beaucoup. »

— « Ah ! madame, » répondit-il, « vous craignez de m’être dure, quand vous auriez le droit d’être si sévère ! … Je veux, moi, que vous sachiez ceci d’abord : vos reproches, quels qu’ils soient, n’égaleront jamais les reproches que je me suis faits, que je me fais à moi-même ! … Oui, » continua-t-il, avec l’accent du remords passionné, « après ce que je viens de voir et de comprendre, comment me pardonner jamais d’avoir été pour vous la cause d’une contrariété, même la plus légère ? … Je sais tout. Je sais, une lettre anonyme, reçue en même temps que la vôtre, m’a tout appris, que ma démarche d’avant-hier a