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il a appris à sauter ainsi. Deux mètres et quart. Mais oui, elle a bien deux mètres un quart… cette rivière. Hé ! Hé ! On franchirait d’autres distances quand il s’agit de mettre l’espace entre un lion et soi… »

– « Un lion ? » demanda la fillette. « Vous avez rencontré un lion, monsieur ? »

– « J’en ai rencontré cent, » répondit Brissonnet, en riant malgré lui du regard stupéfié de la petite Parisienne, « deux cents… Mais M. Favelles me fait trop d’honneur en m’attribuant une vitesse à la course capable d’échapper à la poursuite d’un fauve… Je n’en ai jamais eu le besoin d’ailleurs. Quand un homme rencontre un lion, mademoiselle, sachez-le, c’est toujours le lion qui commence par se sauver. Ça miaule très fort, ces grandes bêtes. Ce ne sont que d’énormes chats, voyez-vous… »

– « Demandez-lui donc alors, d’où lui vient cette cicatrice ?… » reprit Favelles. L’officier n’eut pas le temps de cacher sa main gauche qui montrait une longue trace pareille à celle d’une ancienne brûlure. « Allons, Brissonnet, racontez cette histoire sans fausse modestie, comme vous avez fait à l’un de nos dîners. Vous jugerez, mademoiselle, si les lions sont les gros chats inoffensifs dont il parle… »

– « Vous ne refuserez pas ce plaisir à Charlotte, monsieur… » dit la mère en attirant contre