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et comme cette preuve de son émotion fit mal à Agathe « J’ai compris que vous m’avez parlé comme personne ne m’a jamais parlé, comme personne ne me parlera jamais. Vous avez oublié que je suis mariée et mère. Vous n’avez respecté en moi ni mon mari ni mes enfants. Vous m’avez pour toujours empoisonné le souvenir de relations que j’avais crues simples, honnêtes, droites. Et elles ne l’étaient pas !… Adieu, monsieur, je vous demande de partir d’ici, sans ajouter un seul mot… Vous ne voudrez pas m’avoir obligée d’appeler… »

– « Madame !… » s’écria le jeune homme avec une supplication. Puis, éclatant en sanglots : « C’est vous qui me répondez ainsi, vous, vous !… Ah ! malheureux ! Pourquoi ne me suis-je pas tu jusqu’au bout ? Pourquoi n’ai-je pas emporté avec moi un secret que j’avais si bien caché ? Madame, je vous en conjure, ne dites pas, ne pensez pas que je ne vous ai pas respectée ! N’ayez pas peur de moi surtout !… Ne me faites pas cet affront !… Permettez-moi de vous expliquer !… »

– « Je ne vous permets rien, » dit Madeleine. « Je vous laisse. Vous comprendrez que vous n’avez plus qu’à vous retirer et à ne plus revenir. »

En disant ces mots, elle marcha vers la porte qui séparait le petit salon du cabinet de son mari, d’un pas si rapide qu’Agathe, paralysée par sa terreur d’être découverte, n’eut littéralement pas