Page:Bourget - Les Deux Sœurs, Plon-Nourrit.djvu/197

Cette page n’a pas encore été corrigée

peu plus d’une heure. Immobile, elle demeura indéfiniment à suivre les allées et les retours du balancier. La tentation grandissait, grandissait… Quand il ne resta plus que dix, de ces petites hachures qui représentent les minutes, entre la pointe de la grande aiguille et le chiffre II, la jeune femme ne fut plus maîtresse de cet appétit impérieux qui la dévorait. Elle s’habilla, descendit son escalier, prit une voiture, dans une sorte de somnambulisme dont elle ne s’éveilla qu’en se retrouvant sur le trottoir de la rue Bénouville, à l’angle de la rue Spontini. C’était l’adresse qu’elle avait donnée au cocher. Elle réalisa d’un coup l’énormité de l’acte qu’elle s’apprêtait à commettre. Elle allait y renoncer, quand une silhouette aperçue dans un fiacre lui rendit sa frénésie, accrue encore. Elle venait de reconnaître Brissonnet. Elle le vit qui s’élançait sur le trottoir devant l’hôtel des Liébaut. Il consulta sa montre, du geste de quelqu’un qui se croit en retard… Quand la porte se fut refermée sur lui, la résolution d’Agathe était de nouveau prise. Le plan ébauché dans sa pensée était très simple : demander à monter dans le bureau de son beau-frère, sous le prétexte qu’elle avait un livre à y prendre, en priant que l’on ne dérangeât pas sa sœur… Quand elle eut pressé sur le bouton, le bruit du timbre retentit dans tout son être. Mais déjà cette porte s’était ouverte devant elle, comme tout à