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pas, quand il s’agirait d’écouter caché cette conversation entre Madeleine et Brissonnet dont tout l’avenir de son bonheur, à elle, dépendait ? « Il est jaloux, » s’était-elle répondu en pensée, pour réfuter les objections que la connaissance profonde des timidités du médecin lui suggérait. « Il est jaloux, et un jaloux ne résiste pas au besoin de savoir… Pourvu seulement qu’il ne commette pas la folie d’avoir une explication avec Madeleine avant ?… Mais non. Il lui faudrait avouer qu’il est venu ici et qu’il m’a parlé… Un mari, même le plus aveuglé, ne fait pas de ces confessions-là… » Et voici que ce billet lui apportait la preuve que, cette confession, ce mari-ci l’avait faite ! Une scène de cette nature, entre les deux époux, supposait, de la part de la personne qui l’avait provoquée et qui ne pouvait être que François, un extraordinaire état d’exaltation, celui dont Mme de Méris l’avait vu possédé. Hors de lui, c’était trop certain, il n’avait pas gouverné sa parole. Il avait tout dit à Madeleine, pêle-mêle. Tout !… S’il en était ainsi, la sœur cadette connaissait le conseil que la sœur aînée avait donné à son mari ?… Cette idée suffisait pour qu’Agathe éprouvât contre son complice de quelques instants, et qui venait de la trahir, un passionné mouvement de haine. Elle n’eut pas le loisir de s’y livrer autrement que par cette insulte, répétée rageusement : « Le lâche ! le