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continua-t-elle avec un visible effort, « et du projet que j’avais formé à l’endroit d’Agathe ? … Je rêvais de la marier à M. Brissonnet… Cette alliance t’a souri, à toi aussi, et quand le commandant s’est présenté chez nous, à Paris, nous avons, d’un accord unanime, accepté qu’il pénétrât dans notre société. Il a paru manifester le désir de se rapprocher d’Agathe. Nous ne nous y sommes pas opposés. Bref, il est devenu presque un de nos intimes… Et ce que nous n’avions pas osé espérer est arrivé. Agathe s’est laissé toucher le cœur. Elle l’aime. »

– « Tu ne m’apprends rien, » répondit Liébaut. Il avait sur la bouche l’aveu de sa conversation avec sa belle-sœur. Il se tut cependant, le cœur serré, pour laisser parler sa femme. Qu’allait-elle lui dire, n’étant prévenue de rien ? Il avait là une occasion trop tentante d’éprouver sa véracité, sans se déshonorer lui-même par l’emploi d’une ruse honteuse.

– « Si tu as deviné l’intérêt que M. Brissonnet inspire à Agathe, » reprit Madeleine, « tu te rends compte que tu as pu ne pas être le seul. Elle n’a pas su cacher ce sentiment à d’autres personnes de notre entourage, et qui ne sont pas aussi bienveillantes que toi ou que moi… Bref, on en cause, et Agathe a acquis la preuve que l’on en cause. Elle est venue aujourd’hui me communiquer ses inquiétudes. Elle est tourmentée d’une